Cette durée est supérieure à celle de trente mois proposée par une commission technique mise en place par la junte début février.
La période de transition avant un retour à l’ordre constitutionnel au Burkina Faso, où un coup d’Etat a eu lieu le 24 janvier, a été fixée à trois ans, mardi 1er mars, par des assises nationales qui ont rassemblé les « forces vives » du pays. Une « charte constitutionnelle de la transition » a été signée sous les acclamations par le chef de la junte, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, dans la nuit de lundi à mardi.
« La durée de la transition est fixée à trente-six mois à compter de la date de l’investiture du président de la transition », le lieutenant-colonel Damiba, dispose la charte. M. Damiba, qui a déjà prêté serment le 16 février devant le Conseil constitutionnel, sera investi mercredi par les assises, qui ont impliqué la junte, les partis, les syndicats, les organisations de la société civile de la jeunesse, des femmes et des personnes déplacées par les attaques djihadistes qui frappent le Burkina Faso depuis 2015.
La charte dispose par ailleurs que le président de la transition « n’est pas éligible aux élections présidentielle, législatives et municipales qui seront organisées pour mettre fin à la transition ». Cette disposition s’applique également aux vingt-cinq membres du gouvernement de transition dont « le premier ministre est une personnalité civile ».
Outre le président et le gouvernement, les organes de la transition comprennent un « conseil d’orientation et de suivi de la transition », fixant « les grandes orientations de la politique de l’Etat », et une « Assemblée législative de transition » composée de soixante-quinze membres, selon la charte.
Il précise que deux des principales missions de la transition seront « de lutter contre le terrorisme, restaurer l’intégrité du territoire national » et en « assurer la sécurité », et « apporter une réponse efficace et urgente à la crise humanitaire et aux drames socio-économiques et communautaires provoqués par l’insécurité ». Elle devra également « renforcer la gouvernance et la lutte contre la corruption ».
Outre le reproche d’impuissance qu’il lui était fait face aux groupes djihadistes, le président renversé Roch Marc Christian Kaboré – en résidence surveillée à Ouagadougou depuis le putsch − était aussi accusé de ne pas avoir fait preuve d’efficacité dans la lutte contre la corruption.
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La charte définitive a revu à la hausse plusieurs dispositions contenues dans un rapport d’une commission créée par la junte début février et dans le projet de charte discuté par les assises : transition de trente-six mois au lieu de trente, gouvernement de vingt-cinq membres au lieu de vingt, assemblée législative de soixante-quinze membres au lieu de cinquante et un. Tous seront payés, contrairement à ce que prévoyait le projet.
Négociations à venir
« Les uns et les autres ont exprimé leur position sincèrement, ce n’était pas facile, mais nous avons abouti à un document consensuel », s’est réjoui l’ancien chef de l’opposition, Eddie Komboïgo. Pour Pascal Zaida, président de la Coordination nationale pour une transition réussie (CNTR), la charte est le résultat d’« un consensus qui a été dégagé tant au niveau de l’inéligibilité de certains membres de la transition, de la question de la rémunération, de la durée de la transition et du nombre des membres de l’organe législatif ».
Le lieutenant-colonel Damiba, 41 ans, a pris le pouvoir après deux jours de mutineries dans plusieurs casernes du pays, renversant le président Kaboré, qui n’a pas réussi à endiguer la violence djihadiste : dans le sillage du Mali et du Niger, celle-ci a fait au Burkina, depuis près de sept ans, quelque 2 000 morts et plus de 1,5 million de déplacés.
Des discussions sur la charte devraient rapidement s’engager désormais avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui a suspendu le Burkina Faso de l’organisation le 28 janvier en raison du coup d’Etat. Elle avait demandé aux nouvelles autorités de présenter un calendrier « raisonnable pour le retour à l’ordre constitutionnel ».
La durée des transitions est au cœur des négociations entre les pays de la région touchés par les putschs et la Cedeao, qui réclame qu’elles soient les plus courtes possible. Cette dernière a jugé « inacceptable » celle de cinq ans exigée par le Mali et ne cesse de réclamer un calendrier à la Guinée, qui refuse de se voir imposer un quelconque délai.
Source : AFP